Guerre de Genpei

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Guerre de Genpei
源平合戦
Description de cette image, également commentée ci-après
Paravent à six panneaux. Scène de la guerre de Genpei (1180-1185). Kanō Motonobu, (1476-1569).
Informations générales
Date -
Lieu Japon
Casus belli Dispute entre clans au sujet de la succession impériale
Issue Victoire du clan Minamoto et établissement du shogunat de Kamakura
Belligérants
Clan Minamoto Clan Taira
Commandants
Minamoto no Yoritomo
Minamoto no Yorimasa
Minamoto no Yoshitsune
Minamoto no Yoshinaka
Taira no Kiyomori
Taira no Munemori
Taira no Shigehira
Taira no Tomomori
Taira no Tadanori

Batailles

La guerre de Genpei (源平合戦, Genpei kassen?) nommée également Guerre Jishō–Juei (治承・寿永の乱, Jishō–Juei no ran?) est une guerre civile de l'ancien Japon (1180-1185), qui doit son appellation à la contraction des noms des deux clans qu'elle confronta : les Minamoto (?) ou Gen suivant la lecture on'yomi (chinoise) des caractères d'où le nom du clan Genji (源氏?) et les Taira (?) ou Hei d'où le nom de la famille Heike (平家?).

La guerre de Genpei débute en 1180 lorsque Minamoto no Yorimasa (源頼政) soutient un candidat différent de celui des Taira pour le trône impérial. La guerre s'achève cinq ans plus tard avec la victoire décisive du clan Minamoto à la bataille navale de Dan-no-ura, qui marque la fin de l'ère Heian et le début de la période Kamakura.

Causes[modifier | modifier le code]

Scène de la guerre de Genpei (1180-1185). Kano Motonobu, (1476-1569), période Muromachi (1336 et 1573)

La guerre de Genpei est le point culminant de longues décennies de conflits entre les deux clans pour la domination de la cour impériale (et, par extension, du Japon). Durant les rébellions de Hōgen et de Heiji des décennies précédentes, les Minamoto avaient tenté sans succès de reprendre le contrôle aux Taira. Ceux-ci ont alors commencé une longue série d'exécutions, dans le but d'éliminer une fois pour toutes leurs rivaux.

En 1177, les relations entre l'empereur retiré Go-Shirakawa (後白河) et le clan Taira deviennent très tendues, et l'ancien empereur tente un coup d'État pour renverser le Daijō-daijin (太政大臣) (premier ministre) Taira no Kiyomori (平清盛), qui le fait arrêter en 1179 et abolit l'insei (院政), ou gouvernement retiré, ce qui provoque une forte opposition anti-Taira.

Le , Taira no Kiyomori met sur le trône impérial son petit-fils Antoku (安徳), alors âgé de seulement trois ans, après l'abdication de l'empereur Takakura (高倉). Le prince Mochihito (以仁王), fils de Go-Shirakawa, s'estime lésé de sa place sur le trône et, avec Minamoto no Yorimasa, lance le 5 mai un appel aux armes aux diverses familles de samouraïs et aux monastères bouddhistes.

En juin, Kiyomori déplace le siège du pouvoir impérial à Fukuhara (福原) (aujourd'hui Kōbe), dans le but de promouvoir le commerce avec la Chine des Song (宋), qui fait la richesse de son clan, et le 15 de ce même mois, le prince Mochihito fuit Kyoto et va se réfugier au Mii-dera (三井寺).

Déroulement[modifier | modifier le code]

Début de la guerre[modifier | modifier le code]

La salle du Phénix au Byōdō-in, où Yorimasa se donne la mort par seppuku.

À la suite du soulèvement de Mochihito et Yorimasa, le prince est pourchassé par les Taira et la bataille qui s'ensuit prend place juste à l'extérieur de Kyoto. Elle est appelée première bataille d'Uji, le 23 juin. Au cours de ce qui est considéré comme la première bataille de la guerre de Genpei, Yorimasa se fait seppuku. Mochihito parvient à s'enfuir en direction de Nara, mais est rapidement rattrapé et tué.

Minamoto no Yoritomo (源頼朝), aidé de son beau-père Hōjō Tokimasa (時政, 北条), prend la relève, mais est rapidement vaincu le 14 septembre à la bataille d'Ishibashiyama. Yoritomo fuit alors à Chiba, y lève une armée et va se retrancher à Kamakura (鎌倉) en octobre.

Yoritomo n'est pas le seul à répondre à l'appel à la révolte du prince Mochihito. En septembre, son cousin Minamoto no Yoshinaka (源義仲) lève lui aussi une armée dans les montagnes du Kiso (木曽) où il est né, de même que Minamoto no Yukiie (源行家), battu à deux reprises à Sunomata puis à Yahagigawa par Taira no Tomomori (平知盛).

En novembre, la capitale est retransférée à Kyoto.

Pendant ce temps, Tomomori et son frère Shigehira (平重衡) se vengent de l'implication des sōhei (僧兵) (moines guerriers) aux côtés des Minamoto en attaquant et détruisant Nara (voir Siège de Nara.) Le Kōfuku-ji (興福寺), notamment, sera brûlé le 19 décembre.

Depuis 1177, le Japon subissait une série de mauvaises récoltes qui finit par causer en 1181 une famine qui force une suspension des hostilités qui durera jusqu'en 1183. Même après la reprise du conflit, les faibles récoltes continueront, et, plus fortes dans les terres appartenant aux Taira, contribuant à l'affaiblissement du clan, tout comme le décès de Kiyomori au début de l'année 1181, remplacé par son fils Taira no Munemori (平宗盛), beaucoup moins compétent.

Le tournant de la guerre[modifier | modifier le code]

En , alors que Yoritomo est toujours retranché dans Kamakura, Yoshinaka fait tourner la guerre en faveur des Minamoto en vainquant une des armées Taira à la bataille de Kurikara, puis en entrant dans Kyoto en vainqueur le 28 août aux côtés de Minamoto no Yukiie et de l'empereur retiré Go-Shirakawa, après l'abandon de la ville par les Taira le 25. Ceux-ci, s'étant vu refuser l'aide que Munemori avait demandée aux moines de l'Enryaku-ji (延暦寺), fuient vers Kyūshū en emmenant l'empereur Antoku (安徳天皇), qui n'est encore qu'un enfant.

Go-Shirakawa récompense Yoshinaka en le nommant Asahi Shogun (朝日将軍 ou 旭将軍). Cependant, son armée met à sac Kyoto et l'ancien empereur lui donne l'ordre de poursuivre les Taira dans le but de faire partir l'armée de la capitale. Les forces de Yoshinaka poursuivent l'armée Taira au travers de leurs terres avant d'être vaincues à la bataille de Mizushima le 17 novembre.

Luttes intestines au sein des Minamoto[modifier | modifier le code]

Depuis un certain temps, Minamoto no Yoshinaka voulait prendre le contrôle du clan Minamoto à son cousin Yoritomo qui l'avait humilié quelque temps plus tôt. Revenant à Kyoto en triomphe après ses victoires à Kurikara et Shinohara, malgré la défaite de son allié Minamoto no Yukiie à Muroyama, il complote avec celui-ci pour kidnapper l'empereur retiré Go-Shirakawa et établir leur propre gouvernement dans les provinces au nord de Kyoto, s'appuyant sur la « possession » de l'ex-empereur pour justifier leur règne. Mais Yukiie, en fin de compte, se retire du plan et avertit l'empereur retiré des intentions de Yoshinaka.

À son tour, Go-Shirakawa prévient Yoritomo qui envoie ses deux frères Yoshitsune (源義経) et Noriyori (源範頼), mais ceux-ci arrivent trop tard pour empêcher Yoshinaka de mettre son plan à exécution. Après avoir livré un siège au Hōjūjidono et affronté dans toute la capitale de nombreux partisans des Taira, membres de la cour et moines-guerriers, Yoshinaka parvient à s'enfuir en direction du pont d'Uji, où avait eu lieu la première bataille de la guerre quatre ans plus tôt.

À ce point des événements, les forces de ses cousins sont parvenues à Kyoto et, dans une bataille qui ressemble à une version inversée de celle de 1180, Yoshitsune bat Yoshinaka une première fois le à la seconde bataille d'Uji, avant de le tuer le 21 à la bataille d'Awazu.

Reprise des hostilités contre les Taira[modifier | modifier le code]

Bataille navale de Dan-no-ura en 1185.

Profitant des querelles intestines des Minamoto, les Taira reconstituent leur armée et s'installent avec l'empereur à Fukuhara (Kōbe).

Yoshitsune remporte en une autre grande victoire en s'emparant d'une de leurs forteresses à la bataille d'Ichi-no-Tani, puis entreprend de les poursuivre jusqu'à Yashima (屋島) (aujourd'hui Takamatsu), mais leur flotte les protège en empêchant Yoshitsune de progresser. Il entreprend alors de construire ses propres navires, pendant que son frère Noriyori est envoyé en octobre pacifier par la terre la région de Chūgoku, territoire Taira par excellence. Il remporte une victoire à la bataille de Kojima, mais les Taira s'enfuient à nouveau par la mer. Ne disposant pas de navires pour les poursuivre, la cavalerie de Noriyori ne peut que les regarder partir. Il reste alors bloqué dans la région jusqu'à la fin de l'année, avant de finir par se procurer des bateaux et de débarquer sur Kyūshū en février. Comme à Chūgoku, il n'a pas trop de mal à pacifier la région, les troupes Taira mal nourries en raison de la sécheresse se rendant en masse.

En , Yoshitsune traverse la Mer intérieure (瀬戸内海) et vainc les Taira le 22 à la bataille de Yashima. Ceux-ci s'enfuient une fois de plus, mais Noriyori tenant les côtes de Kyūshū et ayant sécurisé les provinces de Suō et de Nagato, ils se retrouvent sans position de repli et sont finalement vaincus définitivement en avril lors de la bataille navale décisive de Dan-no-ura. De nombreux vaincus, voulant éviter le déshonneur d'être capturés, se suicident en se jetant à la mer, y compris le jeune empereur Antoku dans les bras de sa grand-mère. Selon Mitsuo Kure, « Certains voient dans la mort de ces nobles cultivés et bien élevés le symbole de la fin d'une époque et le commencement d'une autre : celle des seigneurs samouraïs. » (Mitsuo Kure, Samouraïs, p. 25)

Battle of Yashima folding screen
Bataille de Yashima
Battle of Ichi-no-Tani folding screen
Bataille d'Ichi-no-Tani

Conséquences[modifier | modifier le code]

L'anéantissement des Taira de Kyoto voit la fin de l'ère Heian et le début de la période Kamakura, dominée par le bakufu de Kamakura, le premier gouvernement samouraï. Yoritomo, suivant les conseils de ses vassaux, choisit en effet d'installer son gouvernement à Kamakura au lieu d'aller à Kyoto et s'emploie ensuite à mettre en place une structure de commandement lui donnant barre sur les clans de samouraïs, et se fait nommer en 1192 Seii Taishogun (征夷大将軍) par l'empereur, après la mort de Go-Shirakawa. Les Taira des plaines du Kantō, qui avaient été les alliés de Yoritomo depuis le tout début de la guerre, choisirent d'apporter leur soutien au bakufu (幕府).

De son côté, Yoshitsune vient s'installer à Kyoto où on lui donne une place auprès de l'empereur retiré Go-Shirakawa. Yoritomo, inquiet de l'influence de l'Hō-ō sur son frère, et considérant comme une violation de ses privilèges le fait que Yoshitsune avait attribué des terres à ses vassaux pour les récompenser, rappelle alors son frère à Kamakura pour le tenir à l'œil. Yoshitsune finit par demander de l'aide à Go-Shirakawa, et celle-ci venant trop tard, il prend alors la fuite et se voit contraint de fuir dans la province de Mutsu chez son vieux protecteur Fujiwara no Hidehira (藤原秀衡). Il trouve finalement la mort en 1189, aux côtés de ses derniers alliés, parmi lesquels le moine Benkei (弁慶), lors d'un assaut mené par Fujiwara no Yasuhira (藤原安衡), sur ordre de Yoritomo (voir l'article Bataille de Koromogawa.) Quelques mois plus tard, Yoritomo fait exécuter Yasuhira sous prétexte qu'il avait hébergé Yoshitsune, ce qui lui permet de s'assurer le contrôle des riches terres des Ōshū Fujiwara (奥州藤原).

Forces en présence[modifier | modifier le code]

Si généraliser la guerre de Genpei en affrontement entre les clans Minamoto et Taira est loin d'être faux, la distinction entre les deux camps n'est pas aussi simple, comme le fait remarquer Mitsuo Kure (Samouraïs, p. 25) :

  • Lorsque Yoritomo sort de son exil au début de la guerre, le clan Hōjō, branche mineure du clan Taira ayant normalement pour tâche de le surveiller mais liée à lui par son mariage avec la fille de Tokimasa Hōjō, choisit de se battre à ses côtés, de même qu'un certain nombre d'autres vassaux Taira du Kantō.
  • Les Minamoto, comme les Taira, cherchèrent à s'allier le soutien d'autres familles de samouraïs. On retiendra par exemple le clan Takeda (武田氏) de la province de Kai, qui rejoint les Minamoto peu avant la bataille de Fujigawa.
  • De même, les clans Minamoto et Taira tentèrent tous deux d'obtenir le soutien des sōhei (moines-guerriers) de Nara et Kyoto, afin d'ajouter les forces des temples aux déjà très importantes armées de samouraïs de leurs clans. Taira no Kiyomori fit parvenir de généreux dons de soie et de riz à l'Enryaku-ji pour s'assurer qu'ils n'aideraient pas les Minamoto, qui s'étaient eux-mêmes alliés aux moines du Mii-dera.
  • Après la première bataille d'Uji, pour se venger de l'implication des moines aux côtés des Minamoto, Taira no Kiyomori réduisit le Mii-dera en cendres, puis envoya ses fils mener le siège de Nara pour faire subir le même sort à la plupart des temples de l'ancienne capitale. Seul l'Enryaku-ji fut épargné. Le clan Minamoto ne prit aucune part à ce siège, qui opposa uniquement les Taira et les moines-guerriers.
  • Le clan Minamoto dut, à la fin de l'année 1183, affronter une querelle intestine avec la trahison de Minamoto no Yoshinaka. Ces luttes internes laissèrent le temps aux Taira de reconstituer leurs forces.

Liste des batailles[modifier | modifier le code]

Emplacement des batailles de la guerre de Genpei

Liste de personnalités liées à la guerre de Genpei[modifier | modifier le code]

Clan Minamoto[modifier | modifier le code]

Minamoto no Yoritomo

Le clan Minamoto est l'une des familles qui a dominé la vie politique du Japon au XIIe siècle, avec le clan Taira, mais elle avait été décimée à la suite de la rébellion de Heiji en 1160. À la suite de l'appel aux armes du prince Mochihito et de Minamoto no Yorimasa, les membres survivants du clan se rassemblent autour de Yoritomo au début du conflit. La guerre de Genpei permet au clan de prendre le contrôle du pays pour des siècles.

Clan Taira[modifier | modifier le code]

Taira no Kiyomori

Le clan Taira est l'une des familles qui a dominé la vie politique du Japon au XIIe siècle. Après l'élimination presque totale du clan rival Minamoto lors de la rébellion de Heiji en 1160, Taira no Kiyomori, chef du clan, est au début de la guerre au sommet de sa puissance et dirige dans les faits le gouvernement du Japon. La fin de la guerre voit la destruction du clan.

La guerre de Genpei dans la littérature et la fiction[modifier | modifier le code]

La guerre de Genpei inspira de nombreux récits et œuvres d'art, à commencer par le célèbre Heike Monogatari (平家物語?, litt. « Le Dit des Heike ») du XIVe siècle. Par la suite, de nombreux poèmes, pièces de théâtre , kabuki, romans, ainsi que plus récemment des films et des jeux vidéo, s'en inspireront également, par exemple The Heike Story, série animée basée sur une traduction moderne d'Hideo Furukawa du Dit des Heike[1].

Si le Heike Monogatari, de par sa nature épique, ne peut être considéré comme une source fiable, les historiens disposent en revanche d'une chronique nommée Azuma Kagami (吾妻鏡?) qui décrit jour après jour les événements de 1180 à 1266.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

  • La légende de Mimi-nashi-Hôichi, dans le recueil Kwaidan ou Histoires et Études de choses étranges, par Lafcadio Hearn (Koizumi Yakumo, 1850-1904).
  • Hoïchi sans oreilles dans Kwaidan, film réalisé par Masaki Kobayashi en 1965.

Sources[modifier | modifier le code]

  1. Egan Loo, « Le prochain film d'animation de Masaaki Yuasa, Inu-Oh sortira en 2021 », sur Anime News Network, 12/06/2019consulté le=2021-09-26

Liens externes[modifier | modifier le code]